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Brise marine

Un poème sur le thème du voyage. Rien de réjouissant, aucune musique ni aucun enthousiasme, ce voyageur est las de la mer, s'étendant à l'infini devant lui. Il se plaint, comme le bateau chavire, comme les oiseaux sont incertains. Il personnifie son navire, comme seul interlocuteur dans un espace désolé, lorsque les oiseaux ivres ne se prêtent pas à la discussion. Il se jetterait dans l'écume si les matelots ne chantaient pas. Leurs chants, généralement remplis d'une vie et d'une soif insatiable, d'une volonté de fer pour conquérir les terres ou retrouver leur belle.



La chair est triste, hélas ! et j’ai lu tous les livres.

Fuir ! là-bas fuir ! Je sens que des oiseaux sont ivres

D’être parmi l’écume inconnue et les cieux !

Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux

Ne retiendra ce coeur qui dans la mer se trempe

Ô nuits ! ni la clarté déserte de ma lampe

Sur le vide papier que la blancheur défend

Et ni la jeune femme allaitant son enfant.

Je partirai ! Steamer balançant ta mâture,

Lève l’ancre pour une exotique nature !


Un Ennui, désolé par les cruels espoirs,

Croit encore à l’adieu suprême des mouchoirs !

Et, peut-être, les mâts, invitant les orages,

Sont-ils de ceux qu’un vent penche sur les naufrages

Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots …

Mais, ô mon coeur, entends le chant des matelots !


- Stéphane Mallarmé, Vers et Prose, 1893

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